Le corps, une expression plastique

Deux artistes, deux démarches, deux univers. Une seule exposition à visiter jusqu’au 20 janvier.
Deux membres du collectif Essebaghine ont décidé d’exposer ensemble, à la galerie Esma (Oref). Deux techniques résolument différentes mais la même vision des choses. Quel regard porter aujourd’hui sur ces contes persans, considérés comme un chef-d’oeuvre littéraire?
Aussi, cette histoire est-elle revisitée sous l’oeil d’un artiste aiguisé mais sans concession sur le réel.
«Pour moi, explique Nourddine Ferroukhi, cela a été un prétexte de recherche. Je voulais interpréter ces nuits que vivent les Algériens. Ce sont des nuits sordides, un peu perverses car en Algérie tout est dans les non-dits. Je me suis inspiré des cabarets, de ce côté débridé et festif, en y insufflant mon regard voyageur, sensuel. C’est pourquoi j’ai un peu déformé les personnages comme s’ils étaient sur scène. Un côté théâtral voulu. Entre Ammar et moi, nous nous retrouvons sous cet aspect qui fait appel à la peinture du corps…» En effet, l’expo de Feroukhi, qui utilise un mélange de toile, bois, huile et acrylique, «pond» des figures libres sur des formats de tableaux carrés (style contemporain). L’artiste aborde cette métaphore de la nuit sur quatre série de tableaux: série serrures, série fruits, série couples et série patchworks. De ces êtres mous, couples en tout genre, avec le pull marin inspiré peut-être, de celui de Jean-Paul Gautier et son univers -un peu singulier-, transparaît la mansuétude charnelle de la nuit, telle imaginée par l’artiste, qui se plait à dépeindre et rendre beau, ce qui est absurde en nous, ce qui semble anormal, pourtant, chez certains, par une simple touche de poésie et un zeste de tendresse..Un peu dans le même registre, Ammar Bouras a choisi l’abstraction pour faire parler ses oeuvres composées de diverses parties du corps féminin. Histoire de dévoiler ce qui a toujours été considéré comme intouchable et interdit…Entre tableaux et installation vidéo (au Centre culturel français) baptisé: Cyberchahrazad, Ammar explore les contours de la féminité et ses correspondances avec elle par le biais du chat. Sa vision des Milles et Une Nuits? «C’est le besoin de dire pour ne pas mourir. Quand on a un corps beau, il faut le dire, le montrer, pourquoi, s’en cache-t-on?»
De cette expo audacieuse, téméraire, singulière, quasi subversive, s’ajoute un livre catalogue, édité aux Editions Barzakh.
Un ouvrage qui traite de ces nuits légendaires, via des textes d’auteurs,(Adlène Meddi, Mustapha Benfodil, Hajar Bali, accompagnés d’extraits de l’oeuvre originale ainsi que des textes autour de ces contes originaux (Assia Djebar, Waciny Laredj Mourad Djebel, André Brink..) et d’images oniriques et de gribouillages bien inspirés…
Un petit livret assez charmant, reconstituant bien évidemment les oeuvres de deux plasticiens, Noureddinne Ferroukhi et Ammar Bouras. Disponible en librairie au prix de 300DA.
O. Hind 

Tag’Out (Galerie & Vidéo) Rachida Triki • Adlène Meddi

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