Inventaire amoureux



Musique soufie
Une tranche de pizza
Un visage sans nom
Une paire d’yeux sans visage
Un fragment d’inspiration usée
Une bête électronique
Un chaos de coloris
Créant à corps et à cris
Des voix des spectres des lumières
Un caméscope filmant Alger à (rebrousse) poil
Un nu invisible
Un je-te-veux putréfié
Un m’as-tu-vu pétrifié
Un Amour de viande
Un peu de pudeur de la veille
Un pan d’intimité fraîche fraîchement sortie du frigo
Deux jambes grandes ouvertes esquissant un large sourire
Un sexe caché avec une main populaire
Un bouquet de toiles pubiennes
Extrait de discussion sur la place de l’argent dans l’atelier et le rôle des mécènes
en démocrassie obscène
« Le confort ou la bohème ? Mon cœur a voté poème »
Coup d’Etat plastique
Corps-et-graphie élastique
Folie florale
Cuisine picturale
Une tension épicée au goût de cocagne
Une bouteille de cognac et autres boissons musulmanes
Une femme n…u…e dans Son appartement
Un ermite endurci dans son diki
Créant à corps et à cris
Un lit deux places couchant avec un fatras de voluptés protéiformes
Lettres d’amour fossiles, transformées en tags sur un écran plasma
Une déclaration je t’aime numérique
Nassila posant pour Maïssa Bey pour qu’ils s’entendent dans les maquis de charme
Boissons spiritueuses spirituelle la musique amnésique la zizique esprit de sel es-tu là?
Déboucher l’inspiration
L’IMAGINATION au parloir
Emeute de singes, orgie de signes
Destins borgnes
Dessins gigognes
Désirs croisés
Délires opposés
Le subconscient du peintre en train de se brosser les dents
Les restes d’une dispussion avec S.
Métaphysique de la carotte
Voile noir
Mèche rebelle sourire blanc Regard lumineux
S o n i a
Fantasme constantinois perché sur un abîme de pierraille
Scandales en latex
Un graffiti de Cupidon tagué sur un cœur fatigué
« La tarhal âni ya rafiki ! »
Hantise de la toile blanche
Mais qu’est-ce que je vais crier ?
Créer
Crier créer même crissement
Créant à corps et à cris
Il susurra dans l’oreille de sa pâte à combler des murmures venus du plus loin de son enfance
Libertés inutiles
Rires peinturlurés
Puis il s’abandonna au sommeil de ses formes et se laissa dessiner un bouton
« Papa, dessine-moi un mouton ! »
Et le mouton dessina son papa
Hantise de la femme blanche
Nuit blanche amour noir
« Tu es pressé d’écrire comme si tu étais en retard sur la vie »
(René Char)
Et toi, Ammar !
N’es-tu pas pressé de conclure ?
Hâte-toi d’ôter ton caleçon, d’ajuster ton pinceau, de baisser ta garde, d’armer ta liberté, et de charger le monde
Tout le monde en joue !
Lâche tout ce que tu es en train de faire, prends un marteau et détruis tout,
le studio, l’atelier, le totem numérique, la bête électronique,
la transe soufie, la tranche de pizza, la tronche de ta pudeur,
Alger, Cul-bidon, ton subconscient, Constantine,
ton patrimoine génoplastique, tout, tout !
Va faire l’amour à ces yeux qui se découpent de ton néant magnifique !
Quel lamentable amant fais-tu !
Créant à corps et à cris
Laisse partir le modèle, son âme plate, son ombre plane,
Son nombril sans âge en naufrage
Couvre-toi de lumière, tu vas marcher sur des ténèbres
Crépite encore un peu
Frémis à feu doux sur fond de prière érotique
Ecrase ta cigarette, encore une gorgée de whisky sec, et sors affronter ton ego
Le public est prié d’éteindre ses yeux
Irhal âni ya rafiki !
Va-t-en, l’ami, va !
J’ai besoin de tristesse pour repeindre la maison…
Mustapha Benfodil

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